Confusions et viennoiseries au rond-point de Paris
Sept heures du matin, 10 septembre, Riom, rond-point de Paris. De mystérieuses voitures s’accumulaient et voyaient sortir d’elles des personnages hauts en couleurs, en gilet jaune, ou rouge, ou magenta, voire même sans gilet, qui sortaient des palettes afin de créer des barrages filtrants sur quelques voies. Sauf une seule, où le barrage est total.
Mais que faisait la police ? La police, rapporta un journaliste de la Montagne, était allée se chercher une douzaine de viennoiseries dans une boulangerie. Les manifestant·es, une vingtaine (de viennoiseries, sinon ils et elles étaient une quarantaine) ! Cela a visiblement dû fortement altérer leur concentration, puisque si les manifestant·es avaient bien prévu de se regrouper à 7h au rond-point de Paris (affiché de partout), les policiers, eux, les attendaient à 7h à un péage plus loin…
Raté pour la police sur tous les plans.
Plusieurs longues minutes après que les barrages filtrants et le barrage total soient complètement opérationnels, les forces de l’ordre arrivèrent enfin. Ils commencèrent par verbaliser deux motos sur un terre-plein pour s’échauffer. Puis, nos héroïques agents 212, fines fleurs de la Nation Française, firent une entrée fracassante au barrage total. Ils ne firent qu’une bouchée des palettes, jetées avec une rage incroyable sur le bas-côté. Victoire, mais que partielle, car une syndicaliste retraitée vint les remplacer. Ne pouvant pas elle aussi la jeter sur le bas-côté (quoique, dans certaines situations, vous savez…) ils la transportèrent heureusement aux côtés de ses camarades, à deux. La syndicaliste n’en resta pas là, et ce dialogue s’ensuivi :
« […] vous êtes à la solde du gouvernement, dit-elle.
– Bah et vous bah vous êtes pas à la solde d’un parti politique peut-être ? lui-répliqua t-il
– Ca tombe bien, je suis dans aucun parti politique.
– Mais oui, bien sûr, bien sûr, oh ben déjà la CGT…
– La CGT c’est un parti politique ?
– … Il me semblait que c’était pas aujourd’hui les syndicats madame ?
– Vous lisez mal les papiers… »
En effet, les syndicats annonçaient que les mobilisations commençaient à partir du 10 septembre, une autre syndicaliste lui tendit un papier syndical pour appuyer ses propos, mais malheureusement, comme tout bon baqueux qui se respecte (il était de la BAC) il ne voulu pas lire. Rude tâche que la lecture, déjà que lire un point de rendez-vous sur un tract est complexe, soyez compatissants…

Les voies de la discorde
Coup de théâtre ! Un gilet jaune avait alors commencé à filmer. Pudiques, les Gardiens de la Nation lui expliquèrent gentiment (euphémisme) que c’était interdit.
Au même moment, d’autres policiers (plus intelligents que le baqueux) allèrent prévenir les personnes sur les autres points de blocage que seuls les barrages filtrants étaient autorisés. Ouf.
Mais retournons quelques instants à notre ami gilet jaune qui a eu l’audace de secouer un drapeau palestinien sur le terre-plein où avait lieu le blocage total, à côté des policiers. Un gilet jaune qui secoue un drapeau palestinien ? L’un des policiers eut visiblement une erreur système et s’approcha pour lui prendre en photo le visage à quelques centimètres de ce dernier :
« On vous filme ! dit-il alors.
– Ah mais je croyais qu’on avait pas le droit de filmer ? répliqua le gilet jaune.
– Si si, vous pouvez filmer, on fait partie du décor !
– Mais tout à l’heure vous m’aviez dit que non ?
– Oui, vous avez le droit de filmer, sauf quand on vous l’interdit ! »
Du bon sens finalement. D’autres demandèrent quel était ce drapeau, intrigués probablement par l’agencement des couleurs qui rapellait fort celui de l’Italie ou de la Bulgarie. Les manifestant·es, étonné·es par cette question, leur demandèrent si ils ne savaient pas de quel drapeau il s’agissait ? Mais nos policiers ne savaient réellement pas : « Ah non, moi je sais pas de quel drapeau il s’agit, vraiment. ». Semble t-il que la Palestine est un pays aussi connu que le Tuvalu pour nos forces de l’ordre…
De toute façon, il n’était alors plus nécessaire pour les manifestant·es de bloquer plus que ça, puisque dans l’ivresse de leur victoire totale sur les palettes, une retraitée, deux motos sur un terre-plein et une caméra, la police avait réussi à créer un embouteillage gigantesque, bien plus que ce que n’importe quel barrage filtrant n’aurait fait. Participant, de fait, au 10 septembre aux côtés des manifestant·es et validant finalement la théorie de l’alliance avec les forces de l’ordre. Ou alors ils n’auraient pas fait exprès, mais ce serait, hautement improbable.
Les manifestant·es finirent par distribuer leur millier de tracts aux automobilistes, dont les réactions furent en écrasante majorité positives, et en soutien au mouvement. Alors que tous·tes se retrouvèrent à un point à l’écart pour faire le point, la police continuait à entretenir son propre embouteillage, en sifflant au hasard sur des voitures, et comble du comble, elle gara deux de ses propres voitures sur le même terre-plein où se situaient les motos (qui ne dérangeaient personne). Avait elle finalement décidé de concourir contre les manifestant·es sur qui fera le meilleur blocage et aura le plus de viennoiseries ? Nul ne sait.
ZOT, promenade de santé : l’agent 212 est bien caché

Petite promenade
Les manifestant·es arrivèrent à 10h aux Jardins de la Culture pour y commencer à installer la ZOT (Zone d’Occupation Temporaire). Ce n’était pas de l’avis de la police, qui préféra qu’elle ne s’installe au Pré Madame, juste à côté. Du moins c’était là qu’ils attendaient, laissant les manifestant·es librement installer leur ZOT aux jardins. Cela en devenait presque insultant pour Riom. Après une assemblée plénière, à laquelle assista aussi un policier en civil extrêmement discret, une grosse partie des ZOTes (une soixantaine) partirent en opération escargot sur le périphérique de Riom et dans la rue centrale, guidé·es par le son d’une vielle à roue et de casseroles. Les pauvres forces de l’ordre furent toutes perturbées par ce chaos, suivant la marche, nottament car la file se faisait un malin plaisir à tourner autour des ronds-points. Celui du côté de l’hôpital failli leur causer un infarctus : ils crurent que la marche allait bloquer l’institution, alors pourtant que Macron s’en occupe très bien tout seul !
Il y avait aussi le maire dans la rue, Pierre Pécoul, qui passa sans même dire bonjour à qui que ce soit.
L’après-midi fut très calme à la ZOT. Pendant que les ZOTes mangeaient et discutaient, la police cuisait dans sa voiture garée faubourg de la Bade. Parfois envoyant au sein de la ZOT de très discrets policiers en civil, parfois regardant la ZOT de loin d’un air méchant. La pauvre police s’ennuyait tellement qu’elle passait son temps à interpeller des jeunes en leur hurlant dessus pour un oui ou pour un non, qui traversaient le faubourg…

Quelques banderoles à la ZOT
Entre 16h et 17h le monde s’amassa. À 17h eu lieu l’Assemblée Populaire, où diverses actions pour la continuation du mouvement, dont le fait de reprendre exactement les mêmes points de rendez-vous que le 10 pour le lendemain furent décidées collectivement (notez bien cette fois-ci les policiers qui nous lisent !). Mais il ne fallait pas terminer la journée ainsi…
Pas cool le Pécoul
En effet, l’information circula que le conseil municipal s’est réuni exceptionellement ce mercredi 10 septembre. Quelle idée ! À croire que le maire l’a fait exprès, le pire étant qu’à aucun moment la mobilisation n’était à l’ordre du jour…
Ni une ni deux, une partie de la joyeuse compagnie voulu rendre visite à leur cher maire. Et elle était dans son plein droit, étant donné que les conseils municipaux sont ouverts au public ! Le dialogue démocratique fut il établi entre les notables et le peuple riomois ? Les élus d’opposition soi-disants communistes ont il soutenu le mouvement dans ses actions ? Le candidat Pierre 2 Chassaing succédant à Pierre 1 Pécoul et premier adjoint a t-il fait la morale aux gueux ? Toutes les réponses à vos questions dans cette vidéo relatant la quasi intégralité de l’évènement :
Et au retour de la ZOT, nos manifestant·es repartirent chez eux et elles, pour se reposer pour le lendemain, évitant au chemin du retour les 3 policiers en civil subtilement cachés dans un coin derrière l’école d’art et de musique, comptant les feuilles des arbres.
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